La Démarche
Notre point de départ
« Comment réduire le gaspillage dans le secteur du bâtiment tout en créant des projets à haute valeur sociale ?
En pariant sur la durabilité des bâtiments, à l’usage et pour la planète. »
Au coeur, l'architecture.
FAIRE AVEC est une structure d’architecture qui fonctionne par groupement de ressources, fédérée selon les spécificités des projets. Elle sert l’intérêt public et participe à l’amélioration du cadre de vie, plus durable et plus humain. FAIRE AVEC s’inscrit dans l’économie sociale, solidaire et circulaire par sa démarche de récupération de matériaux inexploités et de remontée de besoins et d’envies des premier·es concerné·es.
Nous avons choisi de nous vouer à l’architecture, intrinsèquement sociale, puisqu’elle ne se fait pas sans les contraintes des vivant·es et de la matière. Nous avons choisi de nous vouer à l’architecture puisqu’elle ne se fait pas sans contrainte, sans ces règles du jeu qui nous permettent de travailler : le site du projet, là où se tiendra le prochain bâtiment, l’enveloppe budgétaire et le temps à dompter. Ce sont nos premières règles du jeu.
Mais la prévention déchet dans le secteur et l’amélioration du cadre de vie en impliquant les personnes dans le projet architectural sont des voies que nous pensons nécessaires et essentielles. C’est une démarche écologique et d’économie circulaire qui s’est donnée comme mission de replacer les premier·es concerné·es au cœur du projet puisque l’architecture a tout de même ce modeste objectif de trouver les moyens de nous permettre d’évoluer dans des espaces de qualité, qui nous émeuvent et nous poussent à nous épanouir.
AVEC la récupération de matériaux inexploités
En tant qu’architectes, nous travaillons à professionnaliser la récupération de matériaux inexploités (erreurs de commande, surplus, rebus, fin de stocks, du réemploi et du neuf) en les préconisant aux maîtrises d’ouvrage qui veulent inscrire leur projet dans une économie circulaire. Récupérer les matériaux avant qu’ils ne soient transformés en déchets, c’est créer une nouvelle ressource pour répondre à l’exigence d’une économie de moyens et de la protection de l’environnement. Les projets chez FAIRE AVEC sont autant d’opportunités de développer la filière, puisqu’une filière qui n’a pas de débouchés est une filière qui n’a pas d’avenir.
- pour aller plus loin, lisez notre conversation :
Comment se passe votre démarche de réemploi des matériaux ?
Nous tendons à suivre les lignes directives européennes qui prévoient d’ici 2020 une revalorisation à hauteur de 70 % des déchets issus du BTP. Nous nous concentrons sur comment réduire tous ces déchets. Pour ce faire, il y a plusieurs étapes dans la valorisation : le réemploi qui est le fait de réutiliser un matériau pour ce à quoi il était initialement destiné, sans transformation lourde d’une part et d’autre part, ce que nous tendons à faire, la prévention des déchets. Nous récupérons les matériaux pour ne pas qu’ils se transforment en déchet, c’est-à-dire selon la définition officielle, « tout objet dont on a l’intention de se défaire ». Dans le réemploi, il y a deux types de matériaux, ceux qui sont neufs et les matériaux déconstruits. La filière autour du réemploi se structure depuis quelques années et FAIRE AVEC s’appuie plus particulièrement sur la prévention des déchets avec la récupération de matériaux neufs. Elle peut advenir :
avant le chantier : tous les surplus des fournisseurs, que ce soient les grands magasins ou les fournisseurs spécialisés. En amont du chantier, et dès la phase d’études, nous travaillons avec des gisements identifiés, qui sont de réelles opportunités marquantes dans la conception architecturale. Le dessin intègre dès le départ ces éléments de manière à ce que ça reste harmonieux.
pendant le chantier : toutes les erreurs de commande ou les changements de mode opératoire en cours de chantier. Pour exemple, nous avons reçu une annonce pour récupérer 600 m2 d’isolant de 14 cm. Après l’appel d’offre et pendant le chantier, avec une conception ouverte aux opportunités, des éléments issus du réemploi (au sens large) peuvent être substitués aux matériaux et équipements neufs requis dans l’appel d’offre.
après le chantier : tous les matériaux qui n’ont pas été posés ou qui ont été commandés en surplus. Par exemple, sur un chantier de 200 lampadaires, nous sommes en train d’en récupérer six que nous allons donner à une association culturelle pour éclairer la cour d’un musée.
Comment faites-vous pour inclure le réemploi dans vos chantiers ?
Aujourd’hui, il s’agit de repérer les stocks sur les chantiers de démolition. En fonction de ce que nous trouvons, soit nous adaptons le projet aux opportunités, soit nous cherchons des éléments précis en fonction de nos besoins, avec un peu de souplesse et de résilience sur le choix. Sans entrepôt, on ne peut pas stocker de matériel d’un chantier à l’autre. Évidemment on s’adapte à ce manque de stockage, nous essayons d’abord de récupérer un maximum de matériel sur le chantier lui-même et d’y dédier un espace de stockage tampon.
Comment gérez-vous les contraintes règlementaires liées au réemploi ?
Nous sommes sur des projets dont la règlementation est relativement souple (norme logement ou ERP 5ème catégorie) et nous permet d’expérimenter. Sur les éléments sensibles (comme les panneaux coupe-feu par exemple), le matériel est neuf pour limiter la complexité, notamment dans les échanges et négociations avec le bureau de contrôle. Notre atout aussi c’est que l’on utilise beaucoup de surplus neuf. Cela facilite les choses d’un point de vue règlementaire, mais surtout cela permet de positiver le concept de « déchet » et d’éviter la stigmatisation des habitant·es. Aujourd’hui il y a même des matériaux neufs qui sont jetés. On priorise ce sourcing, pour un de nos projets et l’on a ainsi pu récupérer 250 m² de carrelage dont du Versace !
Le marché du réemploi est en plein essor. N’avez-vous pas peur de la concurrence ?
Bien au contraire. Nous nous appuyons nous-mêmes sur toutes ces initiatives qui sont structurées pour créer un outil utilisable par l’ensemble du monde du bâtiment. Le but est de s’associer avec ces différentes plateformes pour nous nourrir mutuellement de leurs expériences et de nos pratiques. Pour fonctionner, nous pouvons relayer des dons auprès des fournisseurs ou préconiser d’acheter à bas coût via des sites comme Cycle Up. Nous ne récupérons pas directement les matériaux parce que nous ne possédons pas d’espace de stockage et que ce n’est pas la vocation de l’architecte. Nous nous appuyons sur un groupement d’acteurs. Nos deux principaux freins à lever pour la bonne réussite des projets sont les problèmes de stockage du matériel et de logistique. Qui va chercher les matériaux ? C’est pourquoi nous ne réfléchissons pas en termes de concurrence mais de soutiens à la démarche. Il y a beaucoup de questions encore aujourd’hui sans réponse et nous avons collectivement besoin de nombreux retours d’expérience pour avancer toutes et tous ensemble.
Quels sont les points de discussion pour l’utilisation de ces matériaux par rapport au maître d’ouvrage ?
La démarche demande disponibilité et flexibilité au maître d’ouvrage, pour s’adapter au flux des opportunités et acheter les matériaux. En fonction du type de projet, plusieurs critères sont à évaluer : les capacités de stockage sur site, avant le chantier ; la réglementation plus ou moins stricte selon le classement du bâtiment souhaité ; la quantité ou la diversité de matériaux à récupérer. Face à ces points de vigilance existent des contreparties, autres que celles de la bonne action. La démarche oblige à de nombreux échanges et permet de suivre la mécanique du bâtiment, comprendre son chantier et les aléas, accueillir dans son édifice des matériaux qui sont déjà constitutifs de l’histoire du lieu et étudier en amont les impacts de la performance énergétique sur les coûts de fonctionnement du bâtiment.
AVEC la remontée des envies et des besoins
Être solidaire dans les opérations d’amélioration de l’habitat, c’est prendre en compte la multitude des points de vue et intérêts des acteurs impliqués. FAIRE AVEC défend des projets au plus proche des besoins et des envies des premier·ers concerné·es, et soutient l’anticipation des transformations du bâti à long terme, pour s’adapter aux usages aujourd’hui inconnus.
- pour aller plus loin, lisez notre conversation :
Pourquoi la lutte contre le mal-logement par l’architecture ?
Il fait froid, tu te lèves et tu as déjà le souffle court. T’as une migraine. Le froid a beaucoup d’effets et pourquoi pas s’ajouter carrément une intoxication au monoxyde carbone parce qu’on cherche les moyens d’avoir un peu plus chaud ? Le matin, il y a donc le froid à gérer, mais il y a aussi la maladie, puisque sans rénovation, il peut y avoir la maladie qui se développe. Sans rénovation, il peut rester du plomb, dans la peinture ou la tuyauterie, on respire et on tombe malade. Le saturnisme, boum, ce sont des frais et des ennuis supplémentaires. Sans rénovation, on peut laisser l’humidité prospérer, les murs moisissent, on reste à la maison et son asthme empire. Sans rénovation, on tourne et se retourne dans son lit toute la nuit, on n’en a pas d’autre et celui-ci se trouve dans une chambre qui a une très mauvaise isolation acoustique. Ça rend fou. Toujours des frais et des ennuis supplémentaires, qui sont dus à l’insalubrité de notre logement par exemple, qu’on est soit propriétaire ou locataire, simplement habitant.
En quoi la participation des habitants transforme-t-elle les projets de réhabilitation ?
Les projets doivent être menés par les maîtrises d’ouvrage, accompagnées évidemment par les architectes. Il s’agit tout de même de permettre aux premiers et premières concerné·es de reprendre leur place au cœur du projet. Plus qu’un produit financier, un lieu est vécu, au quotidien, par des gens. Le respect de la qualité architecturale au service des besoins et des désirs humains ne peut advenir qu’en étant à l’écoute des premiers et premières concerné·es qui ne sont pas toujours maîtrise d’ouvrages eux-mêmes. L’occasion des échanges et l’organisation d’ateliers est un moyen d’élaborer le programme au plus juste, en fonction de celles et ceux qui habitent et non des typologies idéales préconçues et des modes de vie normalisés. Les projets de réhabilitation de FAIRE AVEC espèrent répondre aux contextes humains qu’ils intègrent.
A quel type d’habitat êtes-vous attachées ?
Un habitat dans lequel on met les habitant·es au cœur de projet, on essaie de trouver différents moyens de faire remonter les besoins et les demandes. Être solidaire dans l’habitat c’est aussi anticiper – penser à long termes les transformations de cet habitat par sa flexibilité. Par exemple, construire ou rénover un centre d’hébergement flexible et adaptable aux politiques publiques aujourd’hui, c’est aussi faire le pari que l’urgence sociale n’est pas une fatalité. Un centre d’hébergement bien pensé deviendra peut-être demain un immeuble d’habitation de droit commun. Ce qui nous importe, c’est d’avancer, même petit à petit, que même à l’écart des typologies idéales préconçues et de modes de vie normalisés, la conception repose sur la considération et la montée en capacité des futur·es logé·es, puisque qu’on n’oublie pas que « l’important, ce n’est pas le résultat mais le parcours effectué (…) en affrontant les obstacles avec un esprit ouvert » (De Carlo, 2000).